V - Perceval, le chevalier de l'auto-réalisation

Poursuivant notre étude approfondie des légendes du Graal, nous nous tournons cette fois vers Perceval le Gallois, et nous commençons par établir avant tout le fait que nous considérons ce chevalier comme étant; le chercheur, celui qui s'efforce d'atteindre le Graal par une voie occulte.

Nous ne voulons pas signifier par là un homme qui, induit en erreur, a échoué dans sa tentative, mais un représentant de ce groupe de chercheurs qui, s'étant approchés de la source, se laissent séduire par l'idée de découvrir la Pierre des Sages au moyen du seul pouvoir cérébral.

C'est là une méthode qui a été essayée au cours des siècles par des millions d'hommes.

Les cinq chevaliers - dent Perceval - qui réussirent plus ou moins à atteindre le Graal, étaient tous issus d'un certain milieu et tous entourés du voile symbolique de figures et de mythes d'un sens mystérieux.

Perceval, dit la légende, est le plus jeune fils d'une veuve; il perdit ses 11 frère dans les combats, et sa mère quitta avec lui le pays, accompagnée de 12 ouvriers, à la recherche d'un foyer nouveau.

Ils arrivent dans le bois de Gâtée, le plus délaissé qui soit au monde et là, ils bâtissent ensemble une demeure; après quoi se déroulent les événements que nous connaissons, à savoir: la rencontre des cinq chevaliers dans la forêt, puis, malgré la défense de sa mère, le départ de Perceval à la recherche de la cour du roi Arthur.

Nous sommes donc ici dans le champ de la recherche: le lieu du monde le plus délaissé; et, après sa rencontre avec les 5 chevaliers Perceval décide de devenir lui aussi chevalier: en conséquence, il se met en quête du But choisi, sous la rayonnement de la quintuple étoile, autrement dit guidé par l'étoile de Bethléem, ou encore par sa rose microcosmique.

Nous rencontrons donc Perceval au début de son chemin de chercheur, et l'on dit de lui qu'il est le fils cadet de la veuve; indication relative à son état de maturité intérieure, aux possibilité qu'il possède d'atteindre le Graal.

En tant que "fils de la veuve", il entre dans l'histoire, en qualité "d'appelé, d'Homme portant au front la signe du feu."

Tous les "fils de la veuve" des légendes doivent aller une voie déterminée; porteurs de l'étincelle divine, ils sont appelés au Voyage de Retour.

Perceval est le cadet de la famille; ses onze frères l'ont précédé dans la mort, de sorte que sa mère craint qu'il ne succombe, lui aussi, dans le combat.

Elle est donc extrêmement triste, lorsque Perceval quitte la maison, en dépit de ses avertissements et de ses lamentations.

Tout ceci a un sens.

Vu en tant qu'aspirent à la queste du Graal, Perceval doit abandonner la "vieille maison" anéantie entièrement par l'ennemi, pour construire autre part, au milieu de la solitude, une Demeure nouvelle, avec l'aide de sa mère et de 12 ouvriers.

Nous nous trouvons ici en face d'une descente renouvelle de l'âme chercheuse et qui aspire, dans une personnalité née-de-la-matière en l'occurrence Perceval qui peut, éventuellement coopérer à l'accomplissement.

Travaillant sous le rayonnement du champ maternel, du champ de la Sainte Force Spirituelle, les ouvriers peinent à bâtir la nouvelle maison, ils préparent les champs, et le jour arrive alors où Perceval se sent poussé à explorer lui-même son chemin.

Comme nous vous l'avons dit, déjà, le nom Perceval signifie: Par soi-même.

C'est ainsi que nous voyons Perceval s'efforcer de se maintenir par lui-même, d'enrichir sa connaissance, de parfaire son expérience - au moyen de diverses méthodes.

Nous la voyons aussi commettre de nombreuses fautes, à l'égard de sa vocation d'âme - telles que, par exemple, le vol de la bague d'une demoiselle. Ce qui prouve sa tendance à vouloir s'élever par une connaissance de seconde main, en dérobant les trésors de l'âme et en s'en servant illicitement. Cet incident de la jeune fille dans la tente représente une rencontre entre Perceval et ses pouvoirs psychiques intérieurs; placé devant ses trésors intimes, il ne sait comment les employer, alors que nous dit le récit, la demoiselle aspire, au fond, à s'unir à lui.

Lorsqu'une légende parle d'une "demoiselle", ou d'une "vierge", elle a toujours en vue l'âme ou le pouvoir de l'âme, une force-vierge, endormie dans l'homme, mais qui aspire toujours, par l'intermédiaire de cet homme, avec l'aide de cet homme, accomplir son but.

C'est-ainsi que nous pouvons considérer le voyage de Perceval en quête de la Cour d'Arthur - où pour la première fois il contemplera le Graal - que se voyage, disons-nous, doit être vu comme la marche harassante de l'homme-feu qui veut vaincre par son seul pouvoir.

Et il n'y réussit pas avant d'avoir revêtu l'armure convenable; ainsi, Perceval reçoit du "vieux chevalier" une tunique venue d'Orient, afin de paraître dignement devant le roi Arthur.

Mais il ne la recevra, au plus tôt que lors du sixième mois passé chez le "vieux chevalier".

Et ce "sixième mois" nous devons le voir comme étant celui de la moisson, le mois de la vierge (le sixième mois est Août dans le calendrier astrologique original).

Ici Perceval entre de nouveau en liaison avec le champ de rayonnement, le champ maternel.

En parlant de Perceval, nous voulons avant tout relier avec lui l'âme, l'âme qui cherche et qui réagit. au moyen des actions de la personnalité matérielle qui l'enferme.

Nous pouvons dire également que Perceval est, à l'instant d'Arthur un type-Caïn.

Il appartient lui aussi à ce groupe d'Etincelles Divines tombées qui doivent retourner au Feu Rayonnant.

C'est ainsi que dans les légendes du Graal également, nous voyons représentés les deux types humain: Bohor et Perceval.

Abel et Caïn.

Le feu et l'eau qui doivent se joindre.

Gauvain et Lancelot sont. eux aussi, des représentants de l'élément-Eau et de l'élément-Feu.

Ceux qui partent à la queste du Graal sous le rayonnement du feu, agissent toujours par auto-réalisation.

Les types eau, eux veulent être guidés, cherchent leur satisfaction dans la mystique - ne désirent pas directement l'activité, mais aiment à philosopher sur la doctrine qui leur est transmise.

C'est pourquoi les rencontres des cinq chevaliers du Graal sont toujours différentes, bien qu'on trouve des points communs entre les aventures de Galaad et celles de Perceval, aventures qui font considérer souvent Perceval comme le Chevalier du Graal!

Toutefois le Graal apparaît seulement lorsque Galaad a pris sa place dans le cercle des chevaliers; avant cela personne n'a encore entendu parler de l'événement du Graal.

L'on comprend que les aventures des deux chevaliers susnommés se ressemblent. Tous deux, en effet, font leur queste du Graal; l'un, Perceval, guidé par les deux sanctuaires: tête et cœur.

Les éléments-sentiments manquent à Perceval alors que les éléments-feu existent en lui dans une large mesure: ce sont justement les aventures guerrières qui apportent une certaine analogie entre Galaad et lui.

A des moments déterminés, tous deux se trouvent face à l'âme et chacun réagit différemment.

Même aventures chez les autres chevaliers.

Le chemin de l'accomplissement du Graal reste inchangé, mais ceux qui le parcourent y impriment leur cachet personnel.

Tout homme trouve ce Chemin delon sa manière et réagit à sa propre façon en des aventures différentes, bien que, celles-ci soient, dans leurs grandes lignes, communes à tous les chercheurs. Chaque chevalier, autrement dit chaque chercheur, devenu mûr et riche d'expériences, chaque homme prêt à aller le Chemin de la Libération, voit ce chemin dans la Lumière de ses expériences personnelles, expériences enfermées dans le microcosme et sous l'influence desquelles agit la personnalité matérielle.

Perceval parvient au Palais du Graal, il y entre et avec ses compagnons Galaad et Bohor, il lui est permis de s'asseoir à la table que le Graal apporté promptement devant les chevaliers.

Il s'assied donc en compagnie du Roi-Pêcheur, le représentent de l'Antique Fraternité aidante sur terre.

Il est admis dans la chaîne des initiés, mais c'est Galaad qui reçoit le Graal pour l'emporter vers Sa Demeure originelle.

Parceval devient alors le compagnon-de-route; comme Bohor, il représente une force indispensable et ensemble ils doivent veiller sur le Graal.

Ce n'est que flanqué de Bohor et de Perceval que le Graal parvient à sa Demeure Eternelle.

A Perceval non plus, il n'est pas donné de regarder dans le Graal, pour y voir "le Commencement et la Fin"; cette faveur n'est accordée, dit-on, qu'à Galaad.

Perceval reste toujours du côté extérieur; il peut prendre part aux dons, mais ne peut les utiliser à son propre service.

Il est chargé de connaissance, il a traversé toutes les expériences et les a résolues à sa façon: néanmoins, il ne lui est pas permis de regarder dans le Graal et il doit s'en retourner à la cour du Roi Arthur.

Voici donc Perceval parvenu au sommet de sa réalisation, il sait le Graal à proximité de lui, mais ne peut cependant, ni Le toucher ni L'accueillir et il doit revenir en arrière pour un nouvel essai. Néanmoins, il a été instruit; il a appris à connaître et à apprécier la présence de Bohor en tant que force indispensable à la quête du Graal, à la marche triomphale finale jusque dans la Demeure Originelle.

Et dans une vie suivante - lui ou plutôt l'âme dans une nouvelle personnalité, tâchera de dévoiler le mystère du Graal s'appuyant sur la connaissance de Perceval et sur la loi de Bohor.

Combien de millions de Perceval n'existe-t-il pas dans le monde?

Combien puissants sont les penchants de la personnalité pour atteindre le grand But à l'aide de ses seuls pouvoirs!

Toute la souffrance et toute la douleur dans lesquelles sombre le monde moderne ne proviennent-elles pas de là?

Cette passion pour l'auto-réalisation, pour l'acte et pour la connaissance, n'est-elle pas cause que la plus grande partie de l'humanité poursuit, coûte que coûte, ses expériences dans tous les domaines?

Voyons en Perceval "l'ambitieux", la grande et forte personnalité, consciente de sa force et poussée par une aspiration intense à accomplir son but. Seulement, ce but, il ne sait pas encore où le trouver; mais en lui sommeille un désir vague, irraisonné qui le fait chercher, qui le contraint à quitter la maison de sa mère; et dès lors, avec une force croissante, la conscience-moi va de l'avant; la conscience-moi qui, de temps à autre, est confrontée avec l'âme dont elle attaqde alors les forces.

Et cela, jusqu'à ce que sa rencontre avec le "Vieux Chevalier" lui dévoile la véritable réalité de son lamentable état-d'être, tout son bluf, toute sa force, tombés à plat.

Aux yeux du "Vieux Chevalier", lui, Perceval, le chercheur sûr, de lui-même reste l'adolescent, celui qui ne cherche que durant une seule vie matérielle et qui emploie le temporel pour rencontrer l'éternel.

En conséquence, le "Vieux Chevalier" fait connaître à ce chercheur sûr-de-lui-même, la "tunique qui vient de l'Orient", la Connaissance et la Sagesse qui se rapportent à l'éternité et à la Lumière perpétuellement existante.

A l'Orient, disaient les Celtes, l'Esprit Universel naît toujours et à nouveau et de là-bas, il rayonne sur la terre, éclaire et réchauffe tous ceux qui en ont besoin.

Mais ceux qui se détournent de cet Orient, montrent qu'ils n'ont pas encore en eux le désir d'être touchés par le rayonnement de l'Esprit Universel.

Dès que Perceval a revêtu cette "tunique de l'Orient", ses réactions changent, sa personnalité se modifie. Il à acquis une Connaissance nouvelle quoique on ancienne nature redresse encore la tête de temps en temps.

Et ce n'est qu'une fois couvert de son armure de l'Orient qu'il contemplera le Graal, qu'il aura le droit de se compter parmi ses Chevaliers.

La question est de savoir si ce chercheur sûr-de-lui pourra oublier sa connaissance d'autrefois, s'il pourra maîtriser et renier son désir de se maintenir tel.

Parler de toutes les aventures de Perceval nous mènerait trop loin.

Toutefois, tout chercheur spirituel se reconnaîtra en Perceval si ce désir a accomplissement vit en lui, s'il' découvre en lui ce stimulant incessant vers la recherche, vers une connaissance toujours accrue. C'est le type d'homme qui n'accepte pas quoi que ce soir sur la foi d'autrui. Il ne peut croire que lorsqu'il a vu la foi concrétisée dans la matière et qu'elle est, non plus une foi, mais une réalisation.

Ainsi il continue à désirer oublient que, sans la "foi" - qui est une émotion du cœur - il n'éprouvera pas l'accomplissement du Graal.

Car tout ce qu'il éprouve n'est que réalité affectant la matière et ces expériences n'ont rien à voir avec l'évolution de l'âme elle-même.

Chaque expérience mûrit l'homme toujours davantage, mais l'âme reste vierge, elle attend le bras chevaleresque qui la libérera. Pourtant l'homme ne doit pas se laisser retenir par ces "aventures chevaleresques", s'y perdre, comme le firent tant de chevaliers.

Non, il doit songer a sa Mission.

Chacune de ces aventures survient afin qu'il acquière la maturité d'un chevalier de l'âme, afin que son bras et son armure aient la force nécessaire pour ramener l'âme à sa Demeure Originelle.

En Perceval également, nous pouvons donc nous reconnaître, surtout ceux qui peuvent se compter eux-mêmes, comme des "chercheurs qui scrutent à fond".

Ils courent cependant le risque, en se tenant dans la contemplation du Graal, de voir celui-ci passer à un autre parce qu'ils n'y sont pas mûrs eux-mêmes.

Ce chemin de Perceval ressemble à la voie occulte, car l'occultisme confine au gnosticisme. Ceux qui pratiquent l'occultisme jouent avec l'idée de la délivrance.

Ils ont suffisamment de connaissance, de force et de qualité, mais ils ne méprennent sur leur propre force et leur destination.

Perceval doit oublier Perceval pour servir la demoiselle - L'occultiste doit s'oublier lui-même pour servir l'âme.

Et c'est là la mission la plus difficile pour l'homme qui suit le Chemin de l'auto-réalisation. C'est pour cette raison que le "Vieux Chevalier", l'Aide, la Force Aidante, prend cet homme un certain temps chez lui, le tient sous sa garde jusqu'à ce qu'il puisse s'abandonner de nouveau au Champ de Force directeur.

Le chemin de l'âme tombée est merveilleusement décrit dans la légende de Perceval: tout d'abord, l'emprisonnement dans le microcosme - la sujétion à la matière - le pays de la solitude - et la rupture d'avec le Champ Maternel.

Puis les diverses Aventures, où l'âme souffre et où la personnalité acquiert ses expériences: se flétrissure à la cour d'Arthur.

Sa rencontre avec le "Vieux Chevalier" en vue de le reconduire de lui-même vers la réalité et de relier de nouveau l'âme à l'homme né de la matière.

Alors seulement, la vraie queste du Graal commence.

Seuls, quelques récits des légendes du Graal sont précieux.

Ainsi, par exemple:

les aventures des cinq chevaliers -

les comportements d'Arthur -

les procédés de Merlin.

Tous les événements ultérieurs ont la marque du moyen âge et sont entourés de l'atmosphère de cette époque.

Un chevalier était en ce temps un homme vaillant et intrépide, engagé dans nombre d'aventures romanesques et guerrières.

Mais entre les lignes nous remarquons les tons sobres et magnifiques d'une antique légende relatant les expériences et les souffrances d'une âme emprisonnée.

C'est à cette âme que nous devons prêter attention, car elle est le motif de notre présence sur terre.

Aussi est-il souhaitable que l'humanité arrive peu à peu à pénétrer la Vérité Universelle contenue dans ces antiques légendes afin de savoir quel est son but sur la terre.

Puissent-ils prendre en exemple ses aventures, ceux qui savent que le nom de Perceval - Par soi-même, est aussi la leur.

L'auto-réalisation est la juste méthode à condition qu'elle se fonde sur la foi et la connaissance - sur le cœur et la tête, sur Bohor et Perceval.

Puisse cette auto-réalisation croître en vous, afin qu'un jour vous regardiez dans le Graal et que s'ouvrent devant vous le Commencement et la Fin.

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