L'evêque foulques
Dans la guerre déclarée à Raymond VI les hommes du pape pouvaient compter sur l'appui d'un individu redoutable: l'évêque de Toulouse Foulques.
Ce riche commerçant de Marseille avait eu une jeunesse peu édifiante et avait connu une certaine célébrité comme troubadour.
Prenant de l'âge il était devenu un catholique fanatique.
En 1205 il avait été nommé évêque de Toulouse. Les opinions de la population toulousaine étaient évidemment diverses.
Certains suivaient aveuglément l'évêque, représentant de la foi officielle. d'autres plaçaient leur confiance dans la riche bourgeoisie consulaire. d'autres enfin mettaient leurs espoirs dans le comte Raymond VI.
Pour terroriser ses adversaires, Foulques mit sur pied une « Confrérie Blanche » sorte de troupe d'assauts qui s'employa à pourchasser les Juifs et les « hérétiques ».
Les désordres devinrent tels que Raymond VI ordonna à Foulques de quitter la ville. Après les pires menaces celui-ci dut partir et il alla rejoindre le camp des croisés.
Pendant ce temps Simon de Montfort soutenu par de nouvelles troupes de croisés envoyées par le pape, et parmi lesquelles on comptait beaucoup de seigneurs allemands, vint mettre le siège devant la ville. Ses forces n'étaient pas suffisantes pour investir, et à plus forte raison enlever une cité aussi puissante, alors surtout que l'évêque, son principal soutien, avait été expulsé.
Au bout de douze jours il dut lever le siège, et sa situation serait devenue critique sans d'autres renforts, encore plus importants, envoyés par Innocent III. Parmi ces derniers on comptait à nouveau de nombreux allemands de Saxe, de Westphalie, de Frise et même d'Autriche.
Intervention du roi d'Aragon
La guerre gagnait en intensité et en ampleur. C'est ce qui décida le roi d'Aragon, Pierre II, célèbre par ses victoires en Espagne contre les Maures, à intervenir en faveur de Raymond VI.
D'une part il était son beau-frère et de plus il exerçait sur les comtés de Carcassonne, de Foix et du Comminges certains droits de suzeraineté. La campagne de Simon de Montfort lui apparaissait comme une menace directe contre ses intérêts au Nord des Pyrénées. Avant levé de nombreux chevaliers en Espagne, Pierre II pénétra dans la vallée de la Garonne et arriva en 1213 à Toulouse avec une armée qui comprenait. dit-on, 2.000 chevaliers et 50.000 fantassins. Il faut noter que de nombreux bourgeois languedociens s'étaient enrolés dans les milices levées à cette occasion.
La bataille de Muret
La rencontre décisive se livra à Muret, le 12 septembre 1213.
Les troupes de Simon de Montfort étaient inférieures en nombre mais la confusion qui régnait si souvent dans les batailles féodales, l'absence d'un véritable commandement d'ensemble, aboutirent à une dramatique défaite. Pierre Il fut tué au combat, ses troupes se débandèrent et les chevaliers de Simon de Montfort massacrèrent sans peine un très grand nombre de ces troupes à pieds que personne ne se préoccupait de défendre. On estime qu'elles perdirent de 15 à 20.000 hommes.
Après ce désastre les seigneurs espagnols revinrent en Espagne, les comtes de Foix et de Comminges se retirèrent dans leurs domaines. Raymond VI et son jeune fils s'enfuirent et vinrent se réfugier en Provence. L'évêque Foulques revint à Toulouse; cependant il n'avait pas les moyens de livrer la ville, qui entendait se défendre, à Simon de Montfort. Celui ci mena alors de petites expéditions pour soumettre de nouvelles portions du comté de Toulouse.
Prémière intervention du roi de France
Jusqu'alors le roi ne France, Philippe Auguste, s'était tenu en dehors du conflit bien qu'il ne s'en désintéressât pas.
En 1214 la victoire ne Bouvines, qu'il venait de remporter contre la coalition organisée contre lui par le roi d'Angleterre, renforçait énormément son autorité et lui laissait les mains libres pour essayer d'utiliser à son profit le drame qui déchirait le Languedoc.
Il autorisa son fils, le futur Louis VIII, à partir pour le Midi à la tête d'une armée qui apportait un appui décisif à l'armée des croisés.
Ce ne fut pas une expédition militaire car il ne rencontra pas de résistance. Au mois de mai 1215, il entra à Toulouse ayant à ses côtés le légat du pape et Simon de Montfort. Il ordonna que les fortifications de la ville soient détruites et il laissa Simon de Montfort sur place qui s'installa au château Narbonnais où résidaient auparavant les comtes de Toulouse.
Le concile de Latran
La même année le pape Innocent III tenait à Rome un grand concile (le concile de Latran) qui s'occupa notamment de la conclusion victorieuse des croisades. Le concile décida que le comte de Toulouse devait être exclu à jamais de son domaine, qu'il devait rester hors du pays pour faire pénitence.
Que tous les domaines conquis par les croisés avec les villes de Toulouse et de Mootauban devaient être donnés à Simon de Montfort «homme courageux et catholique».
Quant au jeune fils de Raymond VI, le futur Raymond VII, s'il se montrait plus tard un bon et fidèle catholique on lui attribuerait à sa majorité la partie du pays qui n'aurait pas été conquise par les croisés. Il n'y eut pas dans le concile une seule voix pour la moindre réserve contre les violences et les cruautés.
Au mois de mai 1216 Simon de Montfort vint à Paris pour recevoir des mains du roi de France l'investiture solennelle des terres qui lui avaient été données par l'Eglise. Elle lui fut accordée sans difficulté.
Quant Innocent III mourut, la même année, il pouvait croire que sa victoire était complète. L'affaire cependant était loin d'être terminée.